L’enfance façonne bien plus que nos souvenirs. Elle façonne aussi notre estime, nos comportements, notre manière de penser… et surtout, la relation que l’on entretient avec soi-même. Grandir avec un parent rabaissant, c’est évoluer dans un environnement où l’amour est conditionnel, les compliments rares, et les critiques constantes. C’est apprendre, dès le plus jeune âge, à douter de soi, à marcher sur des œufs, et à tenter, encore et encore, de mériter une approbation qui semble toujours hors de portée. Les mots répétés deviennent des croyances. Les regards dédaigneux s’impriment comme des vérités. Et même une fois adulte, loin de ce foyer toxique, ces traces du passé continuent de guider nos choix, nos réactions, nos émotions. Beaucoup de personnes ayant grandi dans un tel contexte développent, sans même s’en rendre compte, des mécanismes d’adaptation profondément enracinés. Certains peuvent sembler anodins. D’autres sont douloureusement limitants. Voici huit habitudes que l’on retrouve fréquemment chez les adultes qui ont été rabaissés par un parent durant leur enfance. 1. Le doute de soi permanent : se remettre en question sans cesse Quand un parent critique plus qu’il n’encourage, l’enfant finit par douter de sa propre valeur. Les phrases comme « Ce n’est pas assez » ou « Pourquoi tu n’es pas comme… » s’ancrent profondément. Résultat : même adulte, chaque décision devient un terrain miné. On réfléchit trop, on anticipe l’échec, on cherche l’approbation des autres comme un phare dans le brouillard. Ce n’est pas qu’on ne sait pas quoi faire, c’est juste qu’on n’a jamais appris à faire confiance à son propre jugement. 2. S’excuser constamment, même sans raison C’est un automatisme presque invisible, jusqu’à ce qu’un proche vous le fasse remarquer. On s’excuse quand on dérange, quand on pose une question, même quand quelqu’un nous bouscule. Pourquoi ? Parce que, enfant, on vous a peut-être fait sentir que votre simple présence était une gêne. Alors on s’excuse, pour prévenir le conflit, pour éviter de déranger, pour tenter de mériter sa place. Mais poser la simple question : « Ai-je vraiment fait quelque chose de mal ? » peut déjà enclencher le processus de guérison. 3. Être mal à l’aise face aux compliments Recevoir un compliment devrait être agréable. Mais pour ceux qui ont grandi dans la critique, cela peut déclencher de la méfiance, de l’inconfort, voire un rejet. On minimise : « Oh, ce n’est rien. »On doute : « Il/elle ne le pense pas vraiment. »On détourne l’attention. Pourquoi ? Parce qu’on a rarement entendu de paroles valorisantes. Le cerveau, entraîné à retenir le négatif, peine à intégrer la gentillesse. Mais bonne nouvelle : ce réflexe peut se désapprendre. 4. Se sentir responsable des émotions des autres Un parent instable ou accusateur peut faire croire à un enfant que les émotions des adultes sont de sa faute. Un froncement de sourcil devient une alarme. Une remarque acerbe devient une condamnation. En grandissant, cela se traduit par un besoin irrépressible de plaire, une peur panique de décevoir, et une culpabilité constante quand l’autre va mal — même sans lien direct. Ce n’est pas une faiblesse : c’est une stratégie de survie apprise trop tôt. 5. Une voix intérieure implacable Le parent rabaissant ne disparaît jamais tout à fait : il s’installe dans la tête de l’enfant devenu adulte. Il devient cette voix intérieure qui juge, critique, rabaisse… en continu. « Tu es nul. »« Tu as encore tout gâché. »« C’est sûrement de ta faute. » Ce dialogue intérieur n’est pas inné. Il est transmis, appris, intégré. Et il peut être désappris. La première étape ? En prendre conscience. Et se demander : « Dirais-je cela à mon meilleur ami ? » Si la réponse est non, alors il est temps de rééduquer cette voix. 6. Refuser l’aide, même quand on en a besoin Demander de l’aide, pour certains, est synonyme de faiblesse ou d’humiliation. Parce que, dans leur enfance, les rares fois où ils ont demandé du soutien, ils ont reçu des reproches en retour. Ou pire : un rappel de leur incompétence. Alors ils apprennent à se débrouiller seuls. À ne rien demander. À porter tout, tout le temps. Jusqu’à l’épuisement. Mais l’indépendance n’est pas incompatible avec la vulnérabilité. Accepter l’aide, ce n’est pas se soumettre : c’est s’autoriser à respirer. 7. Trop s’expliquer, tout justifier Dire non, poser une limite, faire un choix simple ? Pas si simple quand on a grandi dans un climat de jugement constant. Alors on explique. On justifie. On se justifie encore. « Je ne peux pas venir parce que… »« Je sais que ça peut paraître bête mais… »« C’est juste que… » Tout cela découle de l’idée qu’on doit toujours prouver qu’on a le droit d’exister, de décider, d’avoir ses besoins. Pourtant, un simple non est une réponse complète. Vous n’avez pas besoin d’un dossier pour légitimer vos choix. 8. Croire que sa valeur dépend de ses réussites Lorsque l’amour parental n’est accordé qu’en échange de performances, l’enfant apprend que pour être aimé, il faut réussir. Avoir de bonnes notes, être utile, se dépasser… toujours. Cette mentalité suit à l’âge adulte : on court après les objectifs, on cherche à être productif, on enchaîne les victoires… sans jamais se sentir suffisant. Parce que, dans le fond, on a associé valeur personnelle et accomplissements. Mais vous n’êtes pas vos succès. Vous n’êtes pas ce que vous produisez. Vous avez de la valeur, même dans l’échec, même dans le repos. Reprendre le pouvoir sur son histoire Reconnaître ces habitudes n’est pas un aveu de faiblesse. C’est un acte de lucidité. Et c’est le premier pas vers la guérison. Il n’est jamais trop tard pour se libérer des chaînes invisibles de l’enfance. Il n’est jamais trop tard pour remettre en question une croyance, pour se parler avec douceur, pour accepter un compliment sans crainte, pour poser ses limites sans culpabilité. La psychologue Lisa Firestone l’exprime avec justesse :« Nous n’avons peut-être pas eu le choix de la manière dont nous avons été blessés, mais